

Depuis les années 1970, les manufactures horlogères collaborent régulièrement avec des artistes pour proposer à leurs clients des pièces « collector » à mi-chemin entre la montre et l’œuvre d’art. Si la maison Piaget a joué un rôle essentiel dans cette démarche en s’entourant, dès 1967, d’artistes majeurs comme Salvador Dali ou Arman, c’est véritablement dans les années 1980 que l’art contemporain a conquis l’industrie horlogère.


En pleine crise du quartz, plusieurs marques suisses cèdent à cette nouvelle technologie made in Japan et introduisent dans leurs collections des « montres à pile ». Mais pour maintenir une image de marque élitiste, elles doivent compenser l’absence de mécanique horlogère par quelque chose d’exclusif… L’art contemporain va alors devenir une option évidente. Swatch fut l’une des marques les plus inventives dans ce domaine en proposant, dès 1985, des séries limitées avec l’artiste français Kiki Picasso, puis avec le street artiste Keith Haring (1986) ou encore avec l’artiste conceptuel Mimmo Paladino (1989). Omega s’engagera également dans cette voie en 1987 avec le lancement de sa « Art Collection » réalisée en collaboration avec 10 artistes, dont Max Bill et Valerio Adami pour les plus célèbres. Produisant une série de montres à quartz, dont le dos du boîtier présente une mini-oeuvre d’art de style abstrait, Omega va inspirer d’autres acteurs de l’horlogerie, dont une manufacture voisine, aussi établie dans le canton de Bern : Epos. Cette marque naît en 1983 avec une ambition affirmée : se positionner sur le terrain de l’horlogerie mécanique abordable. Epos va réussir ce pari en focalisant notamment une partie de son marché sur l’Asie. Vers 1993, Epos commercialise une montre mécanique en édition limitée à 999 exemplaires, réalisée en collaboration avec l’artiste Friedensreich Hundertwasser, l’une des figures les plus extravagantes de l’art contemporain.


Le 20 septembre prochain, la maison de ventes Cortrie, leader en Allemagne dans le secteur des ventes aux enchères d’horlogerie, présentera un exemplaire de cette montre dans un état New Old Stock parfait. Le cadran est décoré d’une spirale colorée qui forme un labyrinthe sans fin, un motif récurrent dans le travail de Hundertwasser. Proposée à la vente pour la somme de 24 400 CHF dans les années 1990, cette série limitée est en réalité une série ultra-limitée puisque le décès de l’artiste a interrompu la production et sur les 999 pièces prévues, seules 200 furent produites et commercialisées !


À noter que ce garde-temps est équipé d’un spécial : Unitas ETA 6497, un mouvement particulièrement utilisé par les écoles d’horlogerie à l’époque, car ses composants relativement volumineux facilitent le travail d’apprentissage. Et justement, ce qui rend cette montre si spéciale, c’est que le calibre a été perfectionné par les enseignants et étudiants spécialisés de l’école suisse d’horlogerie de Bienne afin de permettre un affichage de l’heure lisible des deux côtés !


Estimée 3.800 / 10.000€ (une fourchette estimative très « large »), cette montre est une vraie œuvre d’art. D’ailleurs, elle est répertoriée dans le catalogue raisonné des œuvres d’Hundertwasser, sous le numéro 908 ! La compétition entre collectionneurs de montres et collectionneurs d’art contemporain enflammera peut-être les enchères ! À suivre…
Retrouvez cette montre ici ou sur le site de Cortrie Special Auctions.
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